
J’aime la galette
Je l’ai toujours aimée. Dès le 3 janvier dans les boulangeries, je voyais ce gâteau rond et doré briller derrière la vitre à pâtisserie, ça sentait bon la fleur d’oranger. Je la désirais. Mais non ! «L’Epiphanie n’est pas encore passée, tu attendras le 6 ». La raison avait parlé. Il fallait attendre la venue des Rois mages. Pourvu qu’ils se hâtent ! Ce laps de temps de tentation paraît tellement long, gamin. Pourtant il rend la tradition encore plus appréciable. Le 6, lâchez les chevaux ! La brioche (team brioche, « malheur » se diront les apôtres de la frangipane) est sur la table, moi dessous, et la distribution des parts se déroule au hasard. Je la dévorerai en entier s’il le faut, mais je la trouverai. Au mieux, je suis la reine, au pire la reine de quelqu’un. Au pire du pire, je l’aurai la prochaine fois.
D’ailleurs je me demandais, d’où vient réellement cette tradition ?
Une encyclopédie universelle et multilingue a su répondre à ma requête. C’est une vieille, très vieille fête qui date de l’Antiquité. La « fête romaine des Saturnales » me dit-on.
Pendant 7 jours, les Romains célèbrent le Dieu de Saturne autour d’un festin démesuré et la hiérarchie sociale peut être bouleversée. Maîtres et serviteurs ne sont plus. Il n’y a que des hommes, vêtus comme bon leur semble, partageant la même nourriture et les mêmes breuvages.
Sans distinction, chacun déguste sa part de gâteau dans lequel est caché une fève (la légumineuse). Celui qui a la chance de tomber sur la fève devient le « roi du jour » et peut exaucer tous ses désirs. Une belle opportunité d’inverser le rôle maître/ esclave le temps d’une journée.
Esclave de ma jeunesse, si je l’avais su, j’aurais usé de mon pouvoir.
Claire